Je viens d'une famille aisée, pour ne pas dire honteusement riche. Quand on est la fille d‘un grand entrepreneur millionnaire on comprend vite qu'il n'y a rien qu'on ne puisse pas avoir. Est-ce que j'en ai profité ? Bien évidemment ! Est-ce que l'argent rend plus heureux ? Pas vraiment. C'est certain que ça facilite la vie, mais ça ne remplace pas des parents absents. Je n'ai jamais aimé qu'on me questionne sur ma famille. Car dans ces moments-là j'ai envie de reprendre que ma famille se compose de Dean et Soleanne ni plus, ni moins. Je ne considère mes parents que comme des colocataires occasionnels devant qui je dois donner l'image de la fille parfaite pour être tranquille. Au fond, ils ne connaissent rien de moi outre ce que je veux bien leur montrer.
« Vous devez être tellement fière de vos parents ! » Je levais les yeux au ciel et pris mon plus beau sourire hypocrite. Espérant pouvoir couper court à l’interrogatoire que la journaliste semblait préparer. Je me retournais pour lui faire face après avoir posé mon regard sur mes parents en train de faire un discours. « Oui, je suis vraiment très fière d’eux. Qui ne le serait pas d’avoir des parents qui font tant de choses ?! » Je retins un rire cynique en songeant qu’ils avaient tout réussi sauf leur rôle de parents. Car il fallait avouer qu’ils avaient énormément investi dans l’humanitaire, finançant des écoles et des hôpitaux et faisant des dons pour beaucoup d’œuvres caritatives. Mais c’était justement à cause de toutes ces choses qu’ils avaient voulu faire que je les avais peu vus. J'avais ainsi passé toute mon enfance avec pour principale compagnie mon jumeau et ma petite sœur, ne les voyant que quand ils en avaient le temps. Même aujourd’hui, je ne me rappelais pas de la dernière fois où on avait eu le temps de se parler. Après tout ma mère était le plus souvent prise entre soirées mondaines, shopping et œuvres caritatives où il fallait à tout prix être vu, quant à notre père c'était un grand entrepreneur bien trop occupé à faire fructifier son chiffre d'affaire pour nous prêter attention. « Tout le monde sait qu’ils sont à l’origine de beaucoup de projets et qu’ils ont contribué à bien d’autres. Enfin, je ne vais pas vous embêtez avec tout cela, car je ne vous apprends rien de nouveau. » J'étais finalement assez mal placé pour répondre. Le peu de temps que nous passions ensemble était fait de banalités entrecoupées de silence pesant. Je me sentait bien mieux quand ils n’étaient pas là, je m’était parfaitement habitué à leur absence.

Ils n'ont jamais rien eu à me reprocher de toute façon. J'ai toujours fait en sorte de veiller sur Dean et sur Leanne. J'ai toujours eu une conduite qui sans être irréprochable ne m'a jamais amené d'ennuis et j'ai toujours été une bonne élève. Si je prends parfois mes études un peu à la rigolade, mes résultats n'en sont pas moins irréprochables. En effet, je n'imagine même pas une seconde me contenter de résultats moyens. Rien ne doit être laissé au hasard. Ainsi, je sais quand s'amuser et quand travailler, même si je passe plus de temps au premier qu'au deuxième. Ce qui irrite d'ailleurs certains de mes camarades qui se demandent comment on peut avoir d'aussi bons résultats sans travailler jour et nuit. En effet, j'ai toujours bénéficié d'une excellente réputation et mon dossier scolaire fait pâlir d'envie nombre de mes camarades. Des études de psychologie n'étaient pas vraiment ce que mes parents avaient planifiés pour moi, mais j'ai su leur montrer que c'était ce que je voulais et que ce n'était pas si loin de ce qu'ils avaient imaginés pour moi. De plus, le fait que je suive ce cursus dans l'école de leur choix nous a permis de trouver un bon compromis. Nos relations ont toujours cordiales, jusqu'à ce qu'ils envoient Dean en cure de désintoxication.
« Vous êtes sérieux ?! Vous allez l'envoyer dans cette prison. » J'étais sous le choc, incapable de digérer la nouvelle. Ils se contentaient de me fixer avec un mélange d'embarras et de détermination. Je me levais et m'éloignais de la table où se trouvait les papiers pour ce lieu infâme où ils voulaient envoyer Dean. Bien sûr que je savais que mon jumeau avait des problèmes, on s'était suffisamment disputé pour que je m'en rende compte. Car si Leanne avait réussi à conserver son calme, de mon côté je n'avais pas du tout apprécié de savoir qu'il se droguait, et surtout qu'il ose me dire qu'il contrôlait la situation. Parce que oui pour le moment il la contrôlait, mais qui pouvait dire jusqu'à quand. Mais, je n'étais pour autant pas d'accord avec mes parents. J'avais entendu parler de l'endroit où il voulait qu'il aille et je n'avais vraiment aucune envie que Dean s'y retrouve. J'avais tourné les talons sans prononcer un mot, réfléchissant déjà à comment j'allais le sortir de là, tout en l'empêchant de recommencer ses conneries.

Finalement, Dean est sorti de là, mais je ne peux pas m'empêcher d'avoir peur qu'il recommence. Que cela lui plaise ou non, je compte bien le garder à l’œil. Et puis, comme toujours je serais là pour Leanne car bien qu'elle prétende aller bien, cela n'a plus jamais été pareil après que James soit parti. J'ai bien remarqué l'ambiance entre elle et Eleonora, cependant j'ai préféré ne pas m'en mêler pour ne pas envenimer l'affaire. Et puis, c'est peut-être mesquin de penser ainsi, mais quoi qu'il arrive je serais toujours du côté de Leanne. Leanne c'est un peu mon bébé. Dès que Dean et moi on a été suffisamment grands, on a compris qu'il ne fallait pas compter sur nos parents et on a pris le relai pour être sûr que notre princesse soit aussi heureuse que possible.

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